Interviewé

Tous les ans (depuis un an…), à cette période de l’année, je suis contacté par des étudiants qui font des mémoires sur le blogage politique. Généralement, des échanges de mails s’en suivent au cours desquelles je réponds à différentes questions.

Pour la première fois, hier, une charmante étudiante, Marceline (le vrai prénom, Lauriane, est masqué dans un soucis d’anonymat) est venue m’interviewer à mon bureau (la Comète…) et la discussion de quarante minutes fut passionnante.

Il y avait juste un défaut : nous étions dans la salle du fond car Marceline enregistrait nos propos pour mieux les retranscrire (la pauvre ! avec ma voix à la con, elle va en chier) et je n’ai pas pu lancer mon cri de guerre habituel : « Hé ! Romuald, vieille pédale, tu peux me remettre un demi ? » (ceci n’est pas de l’homophobie mais une vieille plaisanterie entre nous datant du jour où j’ai fait croire à une copine à moi qu’il était homosexuel pour qu’elle arrête de lui faire du charme. Je précise ça pour ne pas avoir d’ennuis avec la Halde. Toujours est-il que nos échanges, avec Romuald, surprennent toujours les autres clients…).

Elle fut passionnante car inédite. Marceline connaît bien les blogs parce qu’elle les étudie à fond pour son mémoire mais elle n’est pas blogueuse elle-même donc reste détachée de la chose et pose les bonnes questions. Quand on discute de blog, avec un type qui n’y connaît, ça ne sert à rien. Quand on discute avec un autre blog, soit on est d’accord, soit on ne fait que marteler des arguments stériles. Marceline, quant à elle, m’aidait bien à approfondir ma réflexion et n’hésitait pas à me balancer à la gueule mes contradictions en me rappelant les conneries que j’avais débitées deux minutes avant.

J’avais déjà été interviewé par des journalistes, l’été dernier, mais elles ne connaissaient rien aux blogs et surtout, cherchaient le détail pour faire plaisir à leurs lecteurs, sans s’intéresser au fond.

Avant de rentrer dans le corps du sujet, je précise que d’être interviewé (même si c’est en tête à tête pour qu’une étudiante puisse en sortir une certaine matière pour rédiger un mémoire) est très intéressant pour un type comme moi, pas spécialement à l’aise à l’oral et toujours impressionné par ces hommes politiques qui arrivent à sortir un tas de trucs dans l’improvisation. Je me rends compte que j’y arrive aussi mais uniquement à propos des sujets que je connais…

Je ne vais d’ailleurs pas rentrer dans le corps du sujet mais laisser Marceline travailler à interpréter ce que j’ai pu lui dire.

Toutefois, quelques points approfondis méritent d’être rappelés.

Marceline m’a confirmé que les journalistes politiques craignaient réellement les blogueurs car ils ne savent pas réellement comment va évoluer leur profession, avec l’évolution des « éditions numériques », des lecteurs cherchant d’abord l’information sur Internet. Je lui ai confirmé que c’est grotesque pour deux raisons. D’une part, nous autres blogueurs n’avons pas accès à l’information, nous ne pouvons qu’interpréter des dépêches, des propos, des interviews. Quand nous avons accès à l’information, par exemple en rencontrant des personnalités politiques, cette information n’intéresse pas le grand public et reste dans une sphère confinée. D’autre part, notre audience est dérisoire. PMA a, en avril, 590 visiteurs par jour (beaucoup moins qu’en mars mais il y avait des élections), la plupart débouchant par Google. J’imagine que deux ou trois blogueurs font beaucoup plus mais – hors blogs de journalistes ou de personnalités politiques – la plupart tournent à beaucoup moins.

Marceline souhaitait savoir ce qui nous motive à ouvrir des blogs. Elle fut bien surprise de ma réponse (le hasard, aidé par quelques compétences en informatique qui m’aident à ne pas buter sur l’utilisation de machins simples). Je serais probablement surpris si elle diffusait les réponses de mes collègues mais je crois que la vraie question est de savoir pourquoi on a poursuivi, pourquoi on s'entête (par passion, pour ma part, comme tout le monde peut avoir son hobby, mais en aucun cas par désir militant).

Marceline voulait comprendre nos rapports aux statistiques de fréquentation, aux classements de blogs et autre machin qui nous poussent à faire des concours idiots. Je crois qu’au fond, dans la mesure où ne gagne pas d’oseille, on s’en fout réellement, au-delà du fait que ça fasse plaisir. L’audience et la position dans les classements montent naturellement et mathématiquement. L’audience, par exemple, ne peut que monter à moyen terme, sauf relâchement, du fait de la croissance des requêtes google (plus on fait de billets, plus on diffuse de mots clés susceptibles d’être repérés). Pour les classements, c’est pareil. Du fait de l’arrêt de certains blogs, il faut beaucoup de conditions pour descendre d’un nombre significatif de places, au sein d’une catégorie, si on s’y intéresse un petit peu.

Quant à monter, une fois qu’on arrive dans les sommets, on ne croit jamais que ça va être possible, tant on voit les autres comme des poids lourds ! Et on se retrouve bêtement premier.

Non. Je ne suis pas gros.