FalconHill
et
Homer
ne décolèrent pas : Mégaupload a été fermé par le FBI. Moi, je m’en fous,
je ne télécharge pas ce qui ne m’empêche pas d’être dubitatif sans être pressé
pour autant.
On a d’un côté une vaste
opération visant à fermer un site qui permettait aux internautes d’échanger des
fichiers et de l’autre, dans la poursuite d’Hadopi en France, une évolution de
loi Américaine visant à favoriser le flicage du net. Le tout sans prendre en
compte l’évolution du marché. Au bord du gouffre, franchissons un grand pas…
Faisons un parallèle honteux
avec le code de la route.
La fermeture du site équivaut à
fermer une autoroute sur laquelle un type a fait un excès de vitesse au motif
que la société d’autoroute gagne des sous en permettant les excès.
Le flicage d’Internet équivaut à
place un dispositif électronique couplé au GPS et au GSM pour transmettre notre
position en permanence pour s’assurer qu’on en fait aucun excès de vitesse, qu’on
respecte bien l’arrêt aux stops (voire au feu rouge, mais il faudrait coupler
le système avec des ordinateurs faisant la régulation des feux : attention
à ceux qui accélèrent à l’orange…).
Finalement, mon parallèle n’est
pas spécialement honteux. Nous avons juste des moyens liberticides et démesurés
pour lutter contre des infractions mineures.
Les limitations de vitesse et un
minimum de moyens pour s’assurer qu’elles sont respectées sont nécessaires
parce qu’en roulant trop vite, on risque de tuer quelqu’un. Pour le
téléchargement, le problème est plus compliqué. Ce n’est d’ailleurs pas le
téléchargement qui est en cause, mais l’usage d’une « œuvre ».
D’ailleurs, avec son bon billet,
Marco m’aide ce matin à balayer le
téléchargement. A l’heure où on nous pousse vers le «
Cloud Computing »
(nos fichiers sont stockés dans des serveurs informatiques et plus en local) et
où mon forfait Orange est couplé à une offre de Streaming (via Deezer, je peux
écouter tout ce que je veux), la notion de téléchargement ne veut plus dire grand-chose…
Si j’achète un morceau de musique avec iTunes pour mon iPhone, il pourra être
écouté sur mon iPad… Et si j’écoute un truc avec mon Deezer, je peux très bien
l’enregistrer sur mon PC (
Vallenain
nous dit comment, aujourd’hui) puis (sans doute), le basculer sur l’iPhone…
Ainsi, en 2011, interdire le
téléchargement relève de la fumisterie, de la ringardise et j’en passe. C’est
techniquement impossible et ça va à l’encontre du progrès. Ainsi, nos
politiciens déploient une énergie délirante et des moyens immenses pour lutter
contre le courant.
Le téléchargement doit être totalement
légalisé.
Quand j’étais bien plus jeune,
quand j’achetais un disque, je le disais à mes copains, il me donnait des
cassettes et je leur copiais les disques. Tout cela était illégal. C’était du
piratage mais ce n’était pas bien méchant. Mes copains n’auraient pas acheté le
disque (entre 15 et 20 ans, on n’a pas l’oseille). Ainsi, le « piratage »
d’une œuvre de proche en proche n’est pas bien grave, on ne peut pas lutter
contre.
D’ailleurs, les gugusses qui ont
fermé Megaupload ne se posent pas la question d’interdire la vente de CD vierges
(de même qu’il y a trente ans, personne n’a interdit la vente de cassettes
vierges alors que tout le monde savait qu’elles étaient majoritairement
utilisées pour enregistrer illégalement de la musique). Le problème, avec
Internet, c’est que le piratage peut être industrialisé… Un type qui veut
acheter un nouvel album aura deux solutions :
-
soit il s’assoit à son bureau et clique
pour le télécharger légalement en payant,
-
soit il s’assoit à son bureau et clique
pour le télécharger illégalement sans payer.
On ne va pas lui jeter la pierre
pour avoir choisi le site gratuit alors que moi-même, quand je récupère de la
musique à partir de Deezer, j’ignore si c’est légal ou non.
Nul n’est censé ignoré la loi,
peut-être, mais il faudrait arrêter de casser les burnes aux citoyens, par
ailleurs contribuables.
Reste le problème de l’usage de
l’œuvre…
Prenons deux gamins.
Savidan
et
Haka. Savidan a acheté un album
de Chantal Goyal et veut en faire profiter Haka. Il charge le fichier sur un
serveur de
Gularu… De nos trois
lascars, lequel a-t-il commis la faute la plus grave, si tant est qu’on pouvait
évaluer la gravité d’une faute ? Haka prend un truc qu’on lui offre. Savidan
veut faire plaisir à un pote en donnant un truc qui n’est pas à lui. Gularu rend
service à des copains, le brave garçon.
Tout cela n’est pas bien grave et
on est tous concernés car tous susceptibles de le faire. Mais le seul à avoir
commis un l’acte qui me parait illégal est Savidan. Il a « dupliqué l’œuvre ».
Gularu se dit que son truc est
bien pratique. Alors il fait de la publicité par le bouche à oreille. Et son
truc marche. Alors il se dit qu’il va y diffuser de la publicité. Puis, il a
des problèmes d’architecture technique car il a trop d’utilisateurs. Il doit
multiplier les serveurs alors il décide de facturer les prestations et d’embaucher
du monde pour surveiller les serveurs et l’aide à les maintenir. Puis, il doit
s’occuper un peu de commercial et rémunère un gros cabinet de
marketing pour cela. Et ça se
développe. Puis il pense à ajouter un index et un moteur de recherche pour
rendre service aux utilisateurs.
Gularu nous est toujours aussi
sympathique, comme au début quand il rendait service à ses copains. Les geeks
sont toujours sympathiques.
Un jour, un
chanteur célèbre découvre qu’on peut
télécharger ses albums gratuitement alors qu’il a du mal à payer les
prostituées qu’il s’envoie après les concerts. Mais quel affreux !
Alors il saisit la justice. Et le
juge va voir Gularu et lui dit « Hé ho, M’sieur,
arrêtez immédiatement vos activités illégales. Vous êtes condamné à payer la
consommation de bière du taulier de Partageons l’Addiction pendant un an. »
Une belle histoire (une fiction,
hein !), qui finit mal.
Un peu comme celle d’un gamin de
15 ans qui se ferait prendre par la police alors que ça fait un an qu’il gagne
un peu d’oseille en vendant des cigarettes de contrebande pour acheter des
couches culottes à sa grand-mère qui n’est plus étanche tout en permettant à
ses potes d’acheter moins cher leurs cigarettes.
Une autre belle histoire qui
finit mal.
Alors, l’avocat de Gularu dit « hého ! Ce n’est pas Gularu qui a mis des œuvres dont
il n’est pas propriétaire et en plus, Gularu ne sait même pas ce que les gens
partagent, ce sont peut-être leurs photos de vacances. » Alors le
procureur dit « Hé ho, mon cochon, non
seulement il met un moteur de recherche pour faciliter les gens dans leurs
recherches mais en plus il gagne de la pub en sachant très bien que le contenu
vendu est illégal, faudrait pas nous prendre pour des couillons. »
Le problème est sans fin. Si le
parking d’un supermarché est utilisé pour vendre des voitures volées, le
propriétaire du parking peut-il être considéré comme coupable ? Evidemment
non…
Je ne sais pas ce que dit le
législateur et ce qu’il devrait dire. Visiblement, le législateur Américain
est de mauvaise humeur, ces temps-ci… Sur le principe, on pourrait juste
dire qu’il ne faut pas gagner d’oseille avec une œuvre qui n’est pas à soi.
C’est du vol ou du recel… Cela dit, qui condamner ? Et votre Fournisseur d’Accès
Internet ? Il gagne bien de l’oseille avec vos conneries !
Que le législateur se débrouille
mais le cœur de métier de Megaupload était bien le transfert illégal de
fichiers…
Le législateur a d’autant plus de
difficultés que les serveurs ne sont pas nécessairement hébergés dans le pays.
Pour contourner ce problème, le législateur français de droite a mis en place l’usine
à gaz couteuse et liberticide qu’est Hadopi. Mais, d’une manière générale, les
législateurs des différents pays sont tous assez libéraux quand il s’agit de
protéger leurs corporations diverses mais assez réactionnaires quand il s’agit,
par définition, de lutter contre le progrès, et de verrouiller Internet, pour
toutes les raisons que l’on peut imaginer.
C’est pourquoi, il est
important de résister…
Le Parti Socialiste envisage de
supprimer Hadopi et de mettre en place une
licence globale. Pour
résumer, l’utilisateur paye une contribution avec son abonnement à Internet et
le pognon ainsi collecté serait redistribué « aux industriels » en
fonction du nombre de téléchargement opérés. Le téléchargement pourrait donc être
totalement libéré, ce qui me parait la meilleure solution.
Charge aux industriels de mettre
en place leurs propres usines à gaz pour gagner de l’oseille, comme le fait
très bien Apple avec iTunes.
Quand la gauche parle de ça, elle
se fait automatiquement taper dessus par la droite… alors que
Nicolas Sarkozy «
a aussi annoncé que le centre
national de la musique serait financé par une taxe sur les abonnements. »
Donc une forme de licence globale ? En plus de Hadopi…
Comprenne qui peut…
Pour ce qui me concerne, je suis
assez proche de la position du Parti Socialiste (ouf) sur trois points :
la suppression d’Hadopi, la libéralisation totale du téléchargement (limitée
aux « simples usagers ») et le versement d’une « contribution
globale » aux « auteurs » (en fonction d’une estimation du
volume de téléchargement). Par contre, je ne suis pas nécessairement d’accord
avec la licence globale telle qu’elle est présentée : je ne souhaite pas
que la taxation se fasse sur l’abonnement Internet (pour différentes raisons
mais directement sur le budget de l’état), quitte – évidemment – à augmenter l’impôt…
Et ensuite ?
Une « licence globale »
permettra d’assurer la liberté et la sécurité de l’Internaute. Il n’empêche que
l’industrie du disque, du film et du livre (même si l’échéance est moins
proche) n’est pas au bout de sa peine : les revenus liés à leurs activités
traditionnels vont forcément baisser et ils devront trouver d’autres canaux
pour empocher du pognon.
Par exemple, Deezer me permet d’écouter
de la musique pour un montant forfaitaire mensuel intégré à mon forfait Orange
(je crois que ça représente environ 10 euros par mois). Deezer verse un montant
forfaire (de l’ordre de 1,5 centime) par morceau écouté. Ils ont de la marge,
je n’écoute pas 667 morceaux par mois… Ca correspond à de nouveaux usages.
Tiens ? Qui est actionnaire
de Deezer ? Notamment Orange et … Xavier Niel (le proprio de Free)… Ceux
là même qui vous apportent des films par l’ADSL chez vous, en vous les fourguant
dans votre abonnement Internet sans vous en donner vraiment le choix.
C’est amusant…
D’un côté, nous avons des états
et des industriels qui mettent en place un pataquès juridique et technique pour
interdire l’accès à des machins et fliquer des Internautes.
De l’autre côté, nous avons des
industriels qui vous refilent sans vous demander votre avis des abonnements où
vous avez droit de regarder ou d’écouter un tas de machins tout en versant du
pognon aux industriels du paragraphe précédent.
Ces derniers sont complètement à
la ramasse.
Par ailleurs, afin de favoriser
le libéralisme (ben oui, les libertés de l’internaute), nous mettons toute la
diffusion « culturel » sous la responsabilité de quatre ou cinq opérateurs
qui réussissent à imposer leurs conditions (souvent pour les intérêts du client
final, on l’a vu avec les baisses de tarifs liées à l’arrivée de free mais
aussi par le fait de se retrouver avec des dizaines de chaînes de télé à la
maison pour un prix, somme toute, dérisoire).
Du coup, je ne sais plus trop
bien à quoi servent la licence globale et la lutte contre le piratage… Pour
empêcher le téléchargement illégal de machins qui ne seraient jamais achetés,
donc pour un téléchargement sans préjudice financier pour l’industriel ?
Est-ce bien utile que l’état dépense notre pognon pour ça ?
Mais c’est vrai ! Pour
éviter les morts sur les routes, on pourrait aussi brider la vitesse des
voitures à 50 km/h. De toute manière, en ville, ça va souvent plus vite en
transport en commun.
D’ici à ce qu’Orange se mette
lui-même à la production de films !
Ils nous fournissent l’Internet,
le téléphone, le mobile, la télé, la musique et les films qu’ils produisent
eux-mêmes ou pas, le tout dans le cadre de forfaits savamment étudiés. Orange partagera
probablement 75% du marché du « réseau » avec Free, dont l’actionnaire
principal a fait fortune avec le Minitel (rose) et le Directeur Général est l’ancien
patron de TF1 Production.
Les législateurs et
industriels qui pâtissent du téléchargement illégal ne seraient-ils pas plus qu’un
peu à la ramasse ?