05 janvier 2014

Twitter n'est pas un bistro

Dans un récent billet, l’ami Sarkofrance compare Twitter à un bistro. Le débat, dans les commentaires est intéressant, mais, au fond, je ne suis d’accord avec personne (y compris avec mon propre commentaire, d’ailleurs, que j’ai fait un peu trop vite mais peu importe).

Jeudi soir, la Comète était fermée. Je suis allé à l’Amandine et au moment de partir vu, que les copains n’étaient pas là, j’ai croisé mon député maire. On se présente nos vœux et on papote un peu. Finalement, je lui propose de boire un verre et nous entrons (il a payé la tournée, c’est toujours ça de pris). Nous étions un groupe de quatre : Tonnégrande, un membre du cabinet du maire, le maire et moi). Il y avait un autre lascar au comptoir, un peu défoncé, mais qui ne savait pas que c’était le maire. C’était une discussion très agréable, entre six personnes courtoise (il y avait le patron) et tout ça. Le lascar est parti et un autre est arrivé. Il a commencé à agressé le maire à propos d’une histoire de logement social. La discussion fut violente et le patron et moi avons été obligés d’intervenir pour les séparer.

Pas facile d’être maire… Il papotait. Il était hors du boulot. Je ne sais plus de quoi on parlait, mais ça aurait pu être de cul ou de foot. Mais ses mandats l’ont empêché de poursuivre cette discussion.

Quand je suis dans Twitter, j’ai parfois un peu le même sentiment. Je discute gentiment avec des gens mais, de temps en temps, je trouve un type qui prend @jegoun pour le taulier de jegoun.net, cet abominable machin suppôt du gouvernement, vendu à la droite et au libéralisme alors que, pendant mes heures de loisir, je ne revendique que d’être un con comme un autre.

Les gens ne savent pas faire la distinction. Je vous assure ! Je parle de bite et automatiquement on va trouver un crétin qui va me traiter de machiste et qui va en déduire que je suis bien à droite… La relation est crétine mais pas surprenante quand on connaît un peu la vraie gauche.

Toujours est-il que le maire et le blogueur que je suis n’ont plus le droit à la vie privée, l’un dans sa commune, l’autre dans les réseaux sociaux.

Il faut revenir à la genèse des réseaux sociaux. Quand Twitter et Facebook ont été créés, nous n’étions qu’une poignée. Je n’allais pas beaucoup sur Facebook. Ces machins se sont popularisés. Facebook est resté ce qu’il devait être mais Twitter est devenu le bordel monstre que l’on connaît actuellement.  Quand j’ai créé mon compte Twitter, il me fallait un identifiant. J’ai pris « Jegoun » que j’utilise ailleurs. J’ignorais alors que Jegoun allait devenir mon pseudo dans les réseaux sociaux puisque je ne savais pas que les réseaux sociaux allaient se développer. Un jour, il m’a fallu choisir un nom de domaine pour le blog politique et c’est naturellement que j’ai choisi Jegoun.

Mais ça ne fait qu’un an ou deux que Jegoun s’est retrouvé dans Twitter que comme un maire au bistro. Je ne suis pas dans Twitter pour défendre la politique du gouvernement ! Pourtant, Twitter n’est pas un bistro. Dans un bistro, on ne peut agresser que les gens présents et seul un ivrogne peut y adresser la parole à quelqu’un sans avoir été invité à le faire. Twitter a complètement évacué les règles de savoir vivre.

Dans Facebook, c’est différent. J’y suis avec mon vrai nom et je n’y diffuse pas les publications de mes blogs. J’ai une page, pour ça. Ceux qui veulent suivre mes blogs à partir de Facebook, peuvent suivre la page. Ils sont très peu et je m’en fous. Dans Facebook, je ne suis pas le blogueur mais le copain, le militant, le cousin,… Dans Google+, j’ai opté pour la même stratégie. « Nicolas Jégou » et « Jégoun » (une page) sont bien séparées. Nicolas Jégou est le membre du réseau social qui se promène et va voir les autres. Jegoun est le blogueur qui diffuse ses billets de blog.

Avec Facebook, le fonctionnement est un peu différent : quand je vais sur ma page, je deviens la page (je signe les commentaires avec le nom de la page et pas avec mon nom). Google+ est donc presque parfait.

C’est un peu comme si un maire pouvait aller dans les bistros de sa commune sans être reconnu par les clients.

Finalement, Twitter est assez amusant à observer. La plupart des membres ont relativement peu d’abonnés mais ces andouilles vont calquer leur fonctionnement sur les gros Twittos et ont l’impression de s’adresser au monde entier alors qu’ils ne seront lus que par leurs abonnés présents à un moment donné. Dans Facebook, quand on publie un truc, on s’adresse à ses proches, ses copains, sa famille… Dans Twitter, le type qui cause semble vouloir s’adresser à la terre et à du monde qu’il ne connaît pas. Moi, je m’en fous, j’ai beaucoup d’abonnés, 4600, je crois, ce qui fait de mon compte un des plus gros (dans les 1% les plus gros je crois), ce dont je me fous totalement (ça va faire sept ans que j’y suis, soit une moyenne de 2 nouveaux abonnés par jour).

Nous allons prendre deux individus au hasard : FalconHill et Romain Blachier. En fait, ce n’est pas le hasard. Ce sont des blogueurs à qui il est arrivé de faire le tour des bistros avec moi et qui peuvent témoigner. Quand je fais cette virée, je connais du monde dans chaque bistro. A la Comète, c’est évident, mais il y a aussi l’Aéro, le Jean-Bart, le Petit Relais, le PMU et l’Amandine. Romain n’a pas dû être surpris (il est adjoint au maire en charge du commerce dans sa commune : il connaît donc tous les bistros). FalconHill, lui, a pu trouver ça étrange (encore que, il lit mon blog, et quand j’ai changé de bistro, avec lui, c’était pour aller voir des personnes précises).

Ainsi, avec Twitter, je suis, comme au bistro. J’ai beaucoup d’abonnés, quand je tweete un truc, je trouve nécessairement quelqu’un pour le lire, ce qui ne peut pas être le cas d’un petit Twittos.

Dans notre milieu de militants politiques, le twittos va essentiellement développer son réseau au sein de personnes proches de lui, politiquement. Le client de bistro, lui, va développer son réseau auprès d’autres clients, par les faits du hasard. Je parlais de Tonnégrande, tiens ! Il venait d’habiter à Villejuif. Pour rentrer chez lui, le soir, il prenait un bus après le métro, dans mon quartier. Un jour, il est venu boire un coup à l’Aéro. Peu après, j’ai commencé à boire un coup à l’Aéro pour ne pas arriver à la Comète avant 19h30 pour ne pas croiser certains imbéciles. Je connaissais néanmoins bien le bistro puisque j’y passais mes soirées du samedi. Donc je connaissais un peu les clients. A force d’à force, Tonnégrande a fini par connaître un ou deux clients et je me suis retrouvé, un jour, dans une conversation. Depuis, Tonnégrande a fini par me suivre dans tous les bistros et est devenu un pilier de la Comète. Par contre, le type qui reste dans Twitter ne va connaître que des gens de son monde, il n’aura pas l’occasion de sortir.

En fait, c’est un peu comme si les patrons de bistro organisaient leurs salles par affinité politique. Dans un coin, la vraie gauche, dans un autre, les socdems, dans l’autre les libéraux,… Le client débarque : il choisit le coin qui lui est attribué et parle avec les types qui sont là.

Mais ce n’est pas le cas. Twitter ne peut pas être comparé à un bistro. Twitter peut être comparé à ce bout de comptoir que le patron réserve aux ivrognes solitaires qui vont brailler des conneries en espérant être entendu par les autres clients qui ne feront même pas semblant de l’entendre.

Et un jour, il alpaguera le maire de la commune parce qu’il est abonné à son compte mais le maire s’en fout, il va unfollower les crétins car il a mieux à faire.

Le maire, lui était peinard, à discuter avec un blogueur qu'il a connu lors de la dernière campagne, avec qui il s'entend bien vu que le blogueur ne parle pas de politique avec lui, il est au repos. Une discussion entre potes de comptoir, quoi ! 

Le twittos qui ne connait son heure de gloire qu'au travers de Twitter ne peut pas le comprendre.


8 commentaires:

  1. Twitter n'est pas un bistrot ? Comment ça https://scontent-b-cdg.xx.fbcdn.net/hphotos-frc3/226211_428643533841349_792286293_n.jpg

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  2. Réponses
    1. Parfait ! Je tombe sur ton commentaire par hasard en voulant répondre à Jacques et à Romain : et paf ! il est 12h... C'est l'apéro.

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  3. Joli billet. Je revois avec émotion et plaisir ces moments où je te suivais de bars en bars. J'ai toujours trouvé ça plus agréable et sympathique qu'étrange... (et ça me manque un peu)

    Sinon ton exemple du début me rappelle des moments pas marrants... Mais bon, les cons sont insupportables que l'on soit maire, élu, blogueur, twittos, ou simple citoyens...

    Joli billet en tous cas. Humain. Certains devraient se souvenir que derrière le @, il y a quelqu'un...

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    1. Il y en a beaucoup qui oublient. Je viens encore de me prendre la tête avec des potes pour une mauvaise blague que j'ai lancée dans Twitter. Avec l'envie de massacrer tout le monde pour me justifier...

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